En laboratoire pour les Narrations du futur

De quoi souhaiterez-vous être spectateur.rice de demain?
Faut-il quitter la terre ou y revenir?
Pourquoi, pour qui, comment travailler?

Elen Gouzien, directrice de L’Évasion, a participé du 24 au 26 juin à Strasbourg, au Labo 6 constitué à l’occasion des Narrations du futur, programme expérimental à la croisée des chemins entre recherche, tables-rondes, plateaux radio, conférences-débats, spectacles et ateliers et performances autour des futurs possibles et désirables, proposé conjointement par le TJP, Centre dramatique national, et Le Maillon.

«Dans un monde où les soubresauts du présent tendent à assombrir nos visions d’un futur souhaité, les arts ont une place essentielle à occuper: celle d’un terrain de jeu pour toutes sortes d’imaginaires, lucides, ludiques, loufoques… afin de parvenir à se projeter au-delà de la crise. Dessiner une métamorphose aussi bien environnementale que sociétale, c’est se doter de nouveaux récits pour interroger la condition humaine aujourd’hui. Transformer cette dernière signifie dès lors questionner les schémas de pensées et de comportements dans lesquels nous évoluons. Comment les arts peuvent-ils nous rendre sensibles aux défis collectifs et nourrir nos désirs de mutations, qu’elles soient mentales, sociétales ou écologiques? C’est par le croisement de sphères souvent déconnectées que Les Narrations du futur veulent interroger notre regard sur le monde.»

– Barbara Engelhardt, directrice du Maillon, et Renaud Herbin, directeur du TJP

Cette opération a fait converger, dix jours durant, des perspectives et des enjeux divers, ceux de la philosophie de l’environnement, de la climatologie et de la biodiversité, de la relation entre les humains, du modèle économique et de l’engagement social…

Parmi les temps forts: les Labos. Dans une démarche collaborative, six groupes de travail constitués de scientifiques, d’étudiants en arts, d’éducateurs, de chefs d’entreprises, de militants associatifs… ont constitué des laboratoires pour imaginer le monde de demain et explorer les récits du futur. Accompagné par Thomas Pondevie, dramaturge et artiste associé au TJP et au Nouveau théâtre de Montreuil, les acteurs des différents laboratoires ont interagi et croisé les schémas de pensée, méthodes et pratiques à la recherche d’un langage commun, pour cheminer ensemble et partager avec le public le fruit de leurs recherches de nouveaux imaginaires.

Aux côtés de Sylvain Hugel, chercheur en neurologie au CNRS, d’Anna Lamfuss, étudiante en quatrième année de scénographie à la Hear (Haute école des arts du Rhin) et Julien Bruneau, artiste danseur, chorégraphe et performer en arts visuels, Elen Gouzien a participé à l’expérience immersive et à la production de réflexions sur le futur à partir d’un texte de Jérémy Damian «Faire trembler le tremblement», faisant un parallèle avec les séismes et nous invitant à envisager le tremblement de terre comme un signal de vie imprévisible plutôt que comme le début de l’effondrement.

A l’issue des travaux de recherches du Labo #6, plusieurs idées se sont dégagées, entre le rapport au temps, la capacité d’agir face au fatalisme, les modifications des représentations du futur en fonction de là ou l’on vit, de l’époque dans laquelle on se trouve, de sa situation sociale, l’envie de se projeter dans une vision positive du futur, à travers le concept de «sobriété heureuse». Ces recherches se sont matérialisées par diverses installations plastiques ou performatives pensées et réalisées par le groupe.

Réflexions

Le mind mapping ou cartographie mentale des réflexions menées pendant le labo.

Le destin

Le «toboggan du destin imposé» présente un destin inexorable et tout tracé, sans possibilité de choix.

La fragilité des possibles

A l’inverse, le mobile en équilibre précaire représente la fragilité des possibles. Il se présente comme un arbre de décision dont le léger tremblement provoqué par le vent ou l’action de l’homme évoque le vivant. La simplicité et sobriété de l’ensemble est l’incarnation d’un futur désirable où l’on se satisfait du basique.

L’oracle

Revêtu d’un mobile évoquant les ailes d’Icare, le performer annonce sa chute programmée. Il invite néanmoins à expérimenter le tremblement à travers un système de stylo télescopique dont la distance provoque un tremblement «créateur»: la forme voulue par le dessinateur devient toute autre…

Le dialogue

«Il y a des endroits qui ont besoin de notre absence», phrase monumentale sur la baie vitrée géante de la loge du Maillon, s’inscrit dans le paysage alentour lequel est à la fois arboré et bétonné. Un dialogue s’installe. Il s’agissait de figurer combien notre liberté dépend d’espaces et de temps dont nous sommes absents. Il y a des endroits qui ne doivent pas être foulés par l’homme, à commencer par les sanctuaires de nature. Même loin de nous, ces lieux se manifestent, comme le reflet sur le sol ou l’ombre de l’inscription derrière le rideau lorsqu’il est fermé.

Composition sonore

L’ensemble de ces installations sont complété par la diffusion d’une composition sonore issues des échanges du labo pendant trois jours: les voix entremêlées injectent dans le présent du visiteur des fragments du passé et les fait réappartenir au présent. La temporalité est bouleversée. Se superposent les ambiances sonores des lieux dont nous sommes absents…

 

Téléchargements
Le programme des Narrations du futur